PFAS : Pas si simple de s’en passer

PFAS : Les clés pour une substitution réussie

Les impacts environnementaux et sanitaires liés à l’utilisation des PFAS (substances per- et polyfluoroalkylées) sont bien connus. Pour limiter leurs utilisations, les solutions passent par de la sensibilisation, des nouvelles réglementations, des compromis, et évidemment la recherche d’alternatives.

Les substances PFAS sont coûteuses à fabriquer et leurs utilisations sont généralement déjà limitées à des applications où d’autres produits chimiques répondraient difficilement au cahier des charges techniques à coût équivalent. Le développement de produits ou de procédés alternatifs « PFAS-free » est rarement simple et nécessite souvent des compromis. De nombreuses entreprises et centres de recherche publics sont investis dans le développement d’alternatives aux PFAS, en travaillant notamment sur des époxys, polyuréthanes, polysiloxanes ou PEEK.  Dans certains cas les fonctions assurées par les PFAS ne sont pas critiques : réduire les frictions, augmenter l’hydrophobie ou l’oléophobie et améliorer la durabilité. L’identification d’alternatives ainsi que la substitution complète des PFAS peuvent être réalisées en quelques années. La substitution est par exemple bien engagée dans certaines industries telles que les peintures et les revêtements, l’emballage ou la fabrication de polymères. Dans la majorité des cas cependant, la transition s’avère beaucoup ardue et fait face à de plusieurs obstacles :

  1. La présence des PFAS n’est pas explicite

Les PFAS sont utilisées dans presque tous les secteurs industriels [1][2]. Des affaires médiatiques et judicaires ont permis de dévoiler l’étendue des dégâts, même dans la presse non spécialisée [3]. Ainsi la problématique PFAS est largement documentée et partagée par les utilisateurs et producteurs de systèmes anti-incendie ou l’industrie du textile. Cependant l’utilisation et l’incorporation des PFAS restent méconnues dans certains secteurs d’activité, et ce par les industriels eux-mêmes. C’est particulièrement notable dans le secteur de la santé, des pesticides ou du chromage. Le flou est encore plus marqué pour les utilisateurs en aval dans la chaine de valeur : la fiche de données de sécurité (FDS) peut par exemple faire mention d’un « ingrédient propriétaire ».  Des récentes études ont également montré que des packagings biodégradables étaient en réalité… composés de PFAS [4][5]. Le développement d’alternatives doit d’abord passer par la sensibilisation des industriels et des acteurs en aval dans la chaine de valeur ainsi qu’une communication plus transparente.

  1. Une balance « bénéfice – risque » parfois à l’avantage des PFAS

Au-delà des récentes condamnations retentissantes atteignant des millions d’euros, pour les industriels les PFAS sont une publicité à éviter. Alors quid du service rendu par le recours aux PFAS ? Pour la première fois, les fédérations internationales de ski et de biathlon ont enfin interdit les composés perfluorés utilisés pour le fartage des skis. Une utilisation des PFAS qui n’aurait jamais dû être permise. Dans beaucoup d’autres cas la situation est bien plus complexe : les PFAS assurent une fonction essentielle dans un équipement indispensable. A titre d’exemple, les mousses anti-incendie AFFF (agent formant un film flottant) intègrent toujours des PFOA (acides perfluorooctanoïques). Ces PFAS permettent de former un film homogène qui étouffe le feu, et dont l’efficacité n’a pas d’équivalent pour s’attaquer aux feux de combustibles liquides. Utiliser uniquement des moyens de lutte incendie sans PFAS c’est faciliter la propagation du feu, accroitre les dégâts sur les infrastructures et mettre en jeu la vie et la santé des personnes, victimes ou intervenants. La production et l’utilisation des PFOA et PFOS (acide perfluorooctanesulfonique) ont été interdites respectivement en 2009 et en 2019 par la Convention internationale de Stockholm, puis lors de sa transposition par le Règlement (UE) 2019/1021. Cependant, une dérogation existe jusqu’en 2025 pour ces mousses incendies ou les dispositifs médicaux pour lesquels les bénéfices apportés par les PFAS sont indéniables, et donc les impacts sanitaires et environnementaux plus facilement tolérés.

  1. L’utilisation des PFAS apporte un avantage compétitif

Dans la plupart des cas les alternatives développées et testées conduisent à des produits ayant des performances inférieures et/ou des durées de vie plus courtes. Les PFAS utilisées dans la fabrication d’équipements de protection individuelle permettent par exemple de répondre facilement aux normes EN 13034 (protection chimique) et EN 465 (protection au feu). L’argument marketing « PFAS-free » n’a que très peu, si ce n’est aucune valeur dans le B2B. Pour beaucoup d’industries, des alternatives existent mais la substitution engendre des surcoûts de production ou de maintenance, avec des risques accrus de fuites, de dysfonctionnement, des mises à l’arrêt ou des remplacements plus fréquents. C’est là l’avantage des PFAS, ils sont particulièrement stables dans les environnements agressifs (chimie, haute température, corrosion…) et donc particulièrement durables. L’identification d’alternatives est alors réalisée au cas par cas au regard d’un cahier des charges spécifique, sur lequel des compromis peuvent être réalisés.

  1. Les alternatives ne sont pas toujours plus vertueuses

Les autres molécules ou équipements utilisés, pour adresser un même cahier des charges, ont parfois des impacts environnementaux similaires si ce n’est plus importants. C’est le cas de certaines alternatives moins durables. Les équipements (textiles, batteries, câbles, joints, revêtements) doivent être remplacés plus fréquemment et une analyse de cycle de vie peut alors révéler des impacts certes différents selon les indicateurs – pollution PFAS, bilan carbone, pollution atmosphérique -, mais dans les deux cas importants. Au sein même des PFAS, beaucoup d’alternatives aux PFOA et PFOS, substances PFAS parmi les plus nocives, sont en réalité des chaines PFAS plus courtes (C4 et moins). Ces chaines plus courtes sont effectivement moins nocives, mais les volumes nécessaires sont plus importants, et donc l’impact environnemental est potentiellement équivalent.

Autant de barrières qui freinent la transition vers une industrie « PFAS-free » et plus vertueuse. La recherche, l’identification et la mise en place d’alternatives sont un vrai défi pour les industriels.

Pour en savoir plus sur l’utilisation et les alternatives aux PFAS : vous pouvez consulter l’étude réalisée par Erdyn pour le gouvernement belge [6].

Erdyn propose d’accompagner ces acteurs dans cette transition, en réalisant des veilles technologiques sur mesure, des recherches de partenaires ou de technologies alternatives. N’hésitez pas à nous contacter (bruno.robert@erdyn.fr) !

Références 

[1] An overview of the uses of per- and polyfluoroalkyl substances (PFAS), 2021, Env. Sci. Process Impacts (DOI: 10.1039/d0em00291g)

[2] https://www.erdyn.com/les-pfas-utilisation-et-reglementation/

[3] The Forever Pollution Project

[4] Assessment of poly- and perfluoroalkyl substances (PFAS) in commercially available drinking straws using targeted and suspect screening approaches, Food Additives & Contaminants, 2023 (DOI: 10.1080/19440049.2023.2240908)

[5] Forever chemicals in the food aisle: PFAS content of UK supermarket and takeaway food ackaging, FIDRA, 2020

[6] https://economie.fgov.be/sites/default/files/Files/Entreprises/pfas-belgian-industry-market-study-final-public-report.pdf

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2024-05-27T14:20:48+02:00lundi 27 mai 2024|Chimie - Matériaux - Procédés, Environnement, PFAS|

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