Dans son rapport intitulé « La productivité et l’emploi dans un monde globalisé »[1] publié en avril 2018, l’OCDE dresse le bilan de la convergence économique au sein de l’Union Européenne entre les années 2000 et 2014. Rappelons que la convergence est un principe qui était au cœur de la construction européenne. En 1957, le Traité de Rome indiquait ainsi que la Communauté Economique Européenne avait comme objectif « d’assurer le développement harmonieux des Etats Membres en réduisant l’écart entre les différentes régions et le retard des moins favorisées ».
Convergence des régions à l’échelle européenne
Bonne nouvelle : à l’échelle de l’Union Européenne, les inégalités entre régions en termes de croissance du PIB/habitant et de la productivité du travail ont diminué depuis le début des années 2000. La très grande majorité des régions européennes ont connu une croissance de leur productivité supérieure à celles des régions européennes les plus riches (soit les régions « frontières » qui représentent 10% de l’emploi total dans l’UE). Les politiques en matière de convergence économique ont donc globalement porté leurs fruits au niveau européen.
Convergence des régions à l’échelle nationale : plusieurs cas de figure
Si les inégalités à l’échelle européenne diminuent, cette tendance n’est pas forcément valable entre régions d’un même pays. La carte ci-dessous extraite de ce même rapport montre l’évolution des dynamiques de productivité régionales au sein de l’Union Européenne pendant cette même période. Les régions qui apparaissent en noir sur cette carte sont les régions « frontières », soit celle(s) qui représente(nt) 10% de l’emploi national et qui possède(nt) le PIB par travailleur le plus élevé du pays.
Dans chaque pays européen, certaines régions peuvent avoir convergé (code couleur bleu foncé), suivi le même rythme (code couleur bleu clair) ou divergé (code couleur blanc, traits noirs) par rapport à ces régions frontières.
Certains pays sont majoritairement constitués de régions convergentes : l’Allemagne, l’Autriche, la Pologne, la Roumanie, le Portugal. Dans ces pays, les régions en rattrapage contribuent significativement à la croissance de la productivité agrégée au niveau national. Parmi les facteurs explicatifs de cette baisse d’écarts entre régions, l’OCDE cite la mise en place de politiques au niveau national qui favoriserait la hausse de productivité des régions moins développées. Les interactions avec les « régions frontières » peuvent également avoir été, dans certains cas, un facteur favorisant la convergence au niveau national. D’autres pays ont surtout des régions qui sont en grande partie restées dans la même dynamique de convergence que celle du début des années 2000 : le Royaume-Uni, la Belgique, la Finlande, la République Tchèque, l’Italie ou encore l’Espagne.
En dehors de ces cas de figure, quatre pays se distinguent par la présence exclusive de régions divergentes sur leur territoire : la France, les Pays-Bas, la Bulgarie et la Hongrie. Dans ces pays, la croissance de la productivité agrégée, ainsi que celle du PIB, est tirée par les régions frontières. Deux conclusions importantes sont formulées par l’OCDE : i) la majorité des dynamiques de croissance sont concentrées à l’intérieur des régions frontières, ii) les effets de cette concentration sur le processus de convergence des autres régions sont très limités. Il y a donc une forte asymétrie territoriale dans ces pays.
Augmentation des disparités régionales dans le cas de la France
Comparées à l’Ile-de-France, toutes les régions françaises ont divergé en matière d’évolution de la productivité du travail entre 2000 et 2014. Elles ont ainsi toutes connu sans exception une croissance de leur productivité du travail inférieure d’au moins 5 points de pourcentage à celle de la région capitale pendant cette période. A titre de comparaison, l’Italie a suivi une évolution opposée à celle de la France entre 2000 et 2014 en termes de croissance du PIB/habitant et de la productivité du travail : la majorité des régions italiennes se sont écartées des régions européennes les plus dynamiques, mais leurs écarts avec les régions « frontières » en Italie se sont réduits ou sont restés stables.
L’OCDE conclue de cette étude qu’un potentiel inexploité existe au niveau de ces régions pour augmenter la productivité du travail nationale. C’est ce potentiel-là que la politique régionale de l’Union Européenne souhaite exploiter, notamment à travers la mise en œuvre des Stratégies Régionales d’Innovation et de Spécialisation Intelligente (SRI-SI) qui seront actualisées et reconduites pour la prochaine période de programmation avec l’ambition de synergies accrues entre fonds structurels et des coopérations interrégionales plus développées.
Kubra ZENGIN ; Consultante en innovation
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